Chronique d'un récit poignant, sans concession, à découvrir.

Il y a une semaine, j'ai eu le plaisir de recevoir le dernier né de Virginie LLOYD, qu'elle a eu la gentillesse de me faire parvenir, accompagné de goodies ! Adorable n'est-ce pas ?

 

 

J'ai aussitôt plongé dans cette histoire, inspirée de faits réels, qui m'intriguait.

La Valse des éphémères nous entraine dans les rues pavées de la capitale, en 1900. Ici deux mondes se côtoient : d'un coté la bourgeoisie, les parvenus, les décideurs qui régissent le monde et organisent la Justice, de l'autre le peuple, contraint de vivre dans la misère, regroupé dans les quartiers populaires et qui connait la faim, la prostitution et la sanction suprême d'une police répressive.

C'est entre ces deux mondes que se rencontrent Eliott et Gabrielle, deux enfants que la vie a rendus plus matures, mais qui rêvent de vivre pleinement leur enfance. Lui est fils de cocher, passionné par la musique dont l'apprentissage lui a été transmis par sa mère. Elle a perdu l'innocence de son âge en vivant dans un quartier pauvre, élevée par une prostituée, faiseuse d'anges par nécessité qui , malgré les aléas de la vie, prend grand soin d'elle.

C'est parce qu'ils ont connu l'amour d'une famille, aussi démunie soit-elle, qu'ils ont développé cette sensibilité qui va les rapprocher et les lier d'un amour plus profond encore.

Ce n'est cependant pas le seul lien qui les unit. Alexander Clayton, entomologiste de retour à Paris après plusieurs années d'expédition qui lui ont permis d'assouvir sa passion pour les insectes, entre dans leurs vie de manière inattendu et assurera le lien, la protection, tout au long du récit. Lui-même, célibataire dont la vie n'est régie que par ses recherches, apprendra beaucoup de ces enfants et découvrira l'envers du décor, qu'il n'avait sans doute pas imaginé ainsi.

Alors que des liens se tissent de par et d'autre, un événement va tout faire basculer, plongeant ces personnages dans une profonde détresse. Car les quartiers populaires de Paris regorgent de violence, d'ententes fratricides et la Justice n'a que faire de ces êtres désargentés, meurtris par la vie, qu'elle compte bien redresser. C'est une justice aveugle aux conditions de vie du peuple, régie par de hauts fonctionnaires qui édictent des règles bien souvent inhumaines, qui n'a que mépris pour les laborieux.

C'est avec effroi que le lecteur va découvrir l'univers carcéral pour jeunes adolescents, les fameuses colonies comme La Petite Roquette, où règnent violence et sanctions sans fondement. On est ici bien loin de la bienveillance attendue envers des enfants. Dans cette société patriarcale, un père peut ainsi décider de redresser son enfant en le confiant à une institution pénitentiaire.

Sous la plume de Virginie LLOYD, la vie carcérale tranche, les mots accompagnent les coups et rien ne nous est épargné du vice d'un directeur de prison ou des supplices subis par ces bambins démunis, ces éphémères dont la lumière ne brille qu'un instant. L'innocence est bien vite remplacée par un mutisme protecteur, une odieuse soumission ou la folie. 

L'écriture au présent renforce cette sensation de froideur et le lexique nous plonge réellement dans l'ambiance, donnant à entendre un refrain populaire, quelques mots d'argot où le vocabulaire fleuri des rues parisiennes début XX°S. Pour autant l'autrice sait aussi bien dire l'amour, le lien, la reconnaissance et emplir d'émotion les pages de son récit. Ainsi les enfants sont-ils perçus, sous le regard bienveillant d'Alexander Clayton, comme ces papillons dont l'existence  n'est tournée que vers la vie, aussi brève soit-elle, volant en myriades, mettant toute leur énergie dans leur survie, simplement pour exister.

Ajoutons que le travail de documentation permet une réelle immersion et donne envie d'en apprendre davantage sur ces institutions que l'on trouvait dans toute la France, à une époque où les enfants étaient, la plupart du temps, considérés comme des êtres à dresser, que l'on devait punir afin de les modeler. Virginie LLOYD nous invite d'ailleurs à consulter quelques sites comme Retronews, site de presse de la BNF, qui se révèle une mine d'informations et propose une bibliographie riche en fin de volume.

A découvrir.

 

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