L'Homme au manteau noir, Diane Setterfield

L'Homme au manteau noir, Diane Setterfield, 351 pages

Editions Plon, collection Feux Croisés, 2014

Genre : roman

Thèmes : famille, deuil, mort,mystère, corbeaux freux

 

L'auteur en quelques mots ...

Retrouvez la biographie de Diane Setterfield sur le billet Le Treizième conte

 

L'histoire

 

" Après avoir songé à ses chers disparus, comme il n'était pas encore mort, il eut le temps d'un dernier souvenir. Ce qu'il extirpa des couches profondes de son esprit, au bout de quarante ans, ce fut un corbeau freux.

Laissez-moi vous expliquer".

Will Bellman avait dix ans le jour où, épatant ses amis de son adresse incroyable, il percuta un corbeau freux isolé sur une branche, d'un coup de lance-pierre. Un coup. Un seul. Passé l'instant de stupeur qui gagna les camarades, l'un voulut l'enterrer avec une cérémonie, un autre souleva l'oiseau "et soudain le noir ne fut plus noir". C'est alors qu'un sentiment étrange envahit Will, un poids lourd pesa sur son coeur pour ne jamais le quitter. Ce jour-là Will eut l'impression d'apercevoir un jeune homme en noir sous un arbre, mais sans doute n'était-ce qu'une illusion...

Son père ayant fui le foyer familial, Will était depuis toujours coupé du reste de la famille, à l'exception d'un oncle, Paul, plus posé et qui souhaitait prendre le jeune homme sous son aile. C'est dans sa manufacture que Will va tout apprendre et se forger une réputation à la hauteur de sa capacité de travail. Car le jeune homme semble doué pour les chiffres, les calculs et l'entreprise progresse rapidement .

Devenu père, co-gérant d'une manufacture qui rapporte sans cesse plus de bénéfices, Will se fait une place dans la famille Bellman. Ses enfants lui donnent plus de joie qu'il n'en aurait espéré et sa vie est l'une des plus enviées par ses anciens camarades. Mais que cache cet acharnement au travail, cet esprit sans repos ?

Il faudra un drame et bien des morts autour de lui pour que Will apprenne que la vie est fragile et qu'il est important d'en prendre soin. Il faudra toute la vigilance de l'homme au manteau noir pour l'amener à comprendre...

 

En vrac et au fil des pages...

 

Je voudrais commencer par me débarrasser du sentiment négatif que j'ai éprouvé à la fin de ma lecture. Je ne sais si cela venait du titre et de son aspect mystérieux, du suspens latent dès les premières pages et la mort de l'oiseau ou encore de mon esprit trop imaginatif qui a voulu voir en l'homme en noir une figure fantastique, toujours est-il que je ressors de ce récit avec un avis mitigé.

Mais reprenons ! Les chapitres alternent le récit de l'évolution de Will Bellman, issu d'une famille modeste mais dont le père aurait pu suivre la lignée familiale des Bellman et quelques pages consacrées aux moeurs des corbeaux freux, leur aspect méconnu et un brin mystérieux. Marqué au fer rouge par les erreurs de son père, Will est donc d'office écarté, ainsi que sa mère Dora, des affaires familiales. Il lui faudra bien du courage, de l'endurance et une vivacité d'esprit hors du commun pour se faire une place de choix dans la manufacture qu'il fera prospérer. Nous voici donc en présence d'un véritable héros.

C'est alors que la chance tourne et la famille, les amis de Will, sont bientôt décimés par une maladie dont on ne sait rien mais qui semble atteindre toutes personnes qui auraient approché Will. Intervient alors, à chaque enterrement, un homme tout de noir vêtu, qui observe Will comme s'il attendait quelque chose. C'est ici ce qui crée le mystère et pousse le lecteur à poursuivre en espérant que cet homme en noir se dévoile, qu'un pacte soit peut-être conclu, que sais-je ?

Pour autant, jusqu'à la fin du récit, l'homme au manteau noir reste une ombre pesante que l'on ne peut s'empêcher de relier à sa première apparition : le jour où Will, enfant, a tué ce corbeau pour épater ses amis.

Sans doute à ce stade le lecteur a-t-il compris ce que le personnage de Will n'a pas encore admis, la dimension toute philosophique de cet homme, homme en noir, homme-corbeau ?

Je suis déçue car tout dans ce roman désigne et souligne le fantastique sans jamais le faire éclore. Le titre en anglais me semble donc plus juste : Bellmann et Black, car ne sous-entend pas cette dimension de mystère liée à l'oiseau. En outre, le lecteur a en tête au moins un film de Hitchcock et des croyances anciennes qui relient le corbeau à la mort. Tout est donc mis en place pour orienter notre lecture. Cela ne serait pas grave si la chute apportait quelque révélation. Pourtant elle est ce que l'on attendait d'elle, plate, sans conviction puisque Will comprend enfin combien la vie est ténue, fragile et importante, ce que tout homme doit comprendre. En réalité c'est l'histoire d'un homme qui ne cesse de renouveler ses erreurs.

Est-ce donc une leçon de vie que veut nous donner Diane Setterfield à travers ce récit qui s'apparente à un conte par certains aspects ? Mais dans ce cas pourquoi avoir laissé planer le doute ? Pourquoi même l'avoir accentué avec la fille de Will, Dora, qui semble avoir une attirance particulière pour ces oiseaux ?

On est loin ici du Treizième conte et c'est très bien mais très déstabilisant aussi. Je pense que la critique a trop insisté sur le mystère, l'incroyable souffle de ce roman. Certes la plume est fluide, alerte, sensible par moments, l'alternance des chapitres donne du rythme, mais l'ensemble est assez pauvre à mon goût car l'on a la sensation de se retrouver à la place de Will et de n'avoir rien compris, rien retenu.

Je reste sur ma faim ...

 

 

 

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