Numéro zéro, Umberto Eco

Numéro Zéro, Umberto Eco, éditions Grasset, 2015, 220 pages

Genre : récit à suspense

Thèmes : fascisme, Mussolini, complot, journalisme, révélations

 

L'auteur en quelques mots ...

Umberto Eco, né le 5 janvier 1932 à Alexandrie dans le Piémont (Italie), est un universitaire, érudit et romancier italien. Reconnu pour ses nombreux essais universitaires sur la sémiotique, l’esthétique médiévale, la communication de masse, la linguistique et la philosophie, il est surtout connu du grand public pour ses œuvres romanesques.

Titulaire de la chaire de sémiotique et directeur de l’École supérieure des sciences humaines à l’université de Bologne, il en est professeur émérite depuis 2008. Devenu ensuite un pionnier des recherches en sémiotique (La Structure absente, 1968, Trattato di semiotica generale, 1975), il développe une théorie de la réception (Lector in fabula, Le rôle du Lecteur) qui le place parmi les penseurs européens les plus importants de la fin du xxe siècle.

Son premier roman, Le Nom de la rose (1980) connaît un succès mondial avec 17 millions d'exemplaires vendus à ce jour.

 

L'histoire

 

Samedi 6 juin 1992. En se réveillant, Colonna est assailli d'un doute : est-ce lui ou un autre qui a fermé l'arrivée d'eau ? Détail sans doute, pourtant ce goutte à goutte dont il ne pouvait se débarrasser s'est bel et bien tu et ,lui, n'a aucun souvenir d'avoir actionné une quelconque manette pour le faire taire. Lorsque sa voisine lui confirme que l'arrivée d'eau a été coupée, il comprend. Ils sont entrés. Ils ont cherché la disquette ...

Revenant sur les trois derniers mois, il entreprend alors de retracer l'aventure à la fois folle et passionnante dans laquelle l'a entrainé Simei en lui confiant la rédaction d'un récit au jour le jour. "Les mémoires d'un journaliste, le récit d'une année de travail pour préparer un quotidien qui ne sortira jamais".Un récit des plus étranges , dans lequel il faudrait mentir, enjoliver une expérience menée en secret et que seuls quelques initiés pourraient suivre : six journalistes, dont Colonna, sont chargés de publier les numéros zéro d'un journal qui ne verra peut-être jamais le jour mais divulguera les dessous de sombres affaires , les complots liés à la politique.

Seul le commanditaire du journal sait que ce dernier ne paraitra jamais. Mais l'essentiel est que les politiques et les puissants pensent que de tels numéros peuvent voir le jour et leur porter préjudice. S'installe alors un jeu de pouvoir et de menace.

Rapidement, Maia , la seule femme du groupe,comprend que l'entreprise tourne au chantage, à la calomnie et se voit mise à l'écart par Simei. D'autres, en revanche, vont plus loin jusqu'à la découverte par Braggadocio du mystère entourant la mort du Duce, Mussolini. D'un indice à l'autre, ce spécialiste de la théorie du complot présente à Colonna sa trouvaille : et si le Duce n'était pas mort comme on le croit, assassiné l, alors qu'il tente de fuir pour la Valteline déguisé en soldat allemand ?

Quel rapport entre le dirigeant fasciste et des affaires récentes ? Ce qui aurait du rester une divagation de journaliste va bientôt tous les entrainer dans une révélation des plus surprenantes. A moins que tout cela ne doive à jamais rester secret ...

 

En vrac et au fil des pages ...

Il est étrange de constater que je n'ai jamais chroniqué les romans d'Umverto eco. J'ai pourtant lu et adoré Le Nom de la Rose, Le Pendule de Foucault .Mais c'était avant le blog. Erreur réparée avec ce récit plus court qui nous entraine dans un tout autre univers, celui du journalisme.

Umberto Eco connait le poids des mots aussi n'est-il pas anodin qu'il ait choisi ce milieu comme intrigue de son roman. Son personnage, Colonna, est d'ailleurs spécialiste de la langue dans le groupe constitué par Simei : la façon dont le lecteur s'approprie une information, ce qu'il met sous les mots du journaliste n'est pas sans rappeler le travail de l'auteur dans Lector in Fabula.

Mais ici la grande histoire va croiser celle de la rédaction de "domani:ieri", nom choisi pour le récit que doit relater Colonna. Lorsque Braggadoccio annonce sa découverte sur la mort feinte du Duce, on n'y croit pas. Puis, comme dans tous les romans où l'on nous rapporte des faits incontestables, on se prend au jeu et l'on suit l'emboitement des pièces du puzzle en se disant : et si c'était vrai ? Je n'en dirai pas plus car ce serait divulguer une trop grande partie du roman.

Le point fort réside dans l'attente des découvertes de Braggadoccio, intercalées avec des chapitres consacrés à la réécriture d'affaires sordides ou politiques par les journalistes. Un journal fictif dans lequel on dévoilerait ce que le lecteur ne sait pas encore mène forcément à des dérapages. L'on en viendra donc , avec l'auteur, à remettre en question un certain journalisme à scandale. D'autant que l'on apprend ici comment falsifier des témoignages, faire référénce à des catastrophes similaires de manière à effrayer le lectorat lorsqu'un événement survient. La théorie du complot n'est jamais loin et nos journalistes en feront les frais.

Pour ma part j'ai apprécié la promenade dans Milan, vue sous un autre jour, éclairée par l'Histoire, tantôt sombre avec Braggadoccio, tantôt plus romantique avec Maia.

Une trouvaille !

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