Damné, Tome 1 : l'Héritage des cathares, Hervé Gagnon

Damné, Hervé Gagnon, tome 1: l'Héritage des cathares, éditions Hugo et Cie, 2012, 428 pages

Genre : fiction historique

Thèmes : Cathares, Vérité, Croisés, Templiers, foi, guerre, enfance, apprentissage

 

L'auteur en quelques mots ...

 

 

Damné, Tome 1 : l'Héritage des cathares, Hervé Gagnon

Hervé Gagnon, né en 1963 à Chicoutimi (Canada), a enseigné l'histoire et la muséologie dans diverses universités. Depuis 2000, il a écrit seize romans pour la jeunesse, dont plusieurs ont été primés. Il est l'auteur de la très populaire saga Le Talisman de Nergal. Sa série Damné, adressée aux adultes, a comme toile de fond la croisade contre les Cathares au début du XIII e siècle. Sa nouvelle série, Malefica, dont les deux premiers tomes ( La Voie du livreet La Voie royale) ont paru en 2014 chez Hugo Roman, se penche sur les heures sombres de l'Inquisition et le sort des femmes guérisseuses. Le troisième volume, La Voie du sang, paraît en février 2015 chez le même éditeur. (source Babelio)

L'histoire :

 

Parce qu'il est né voilé, Gondemar de Rossal est condamné d'avance à être considéré comme l'incarnation du diable. Son père, seigneur de faible envergure, qui traite bien ses sujets mais ne sait défendre son domaine, ne le tolère que parce qu'il assure sa descendance. Les conditions de vies difficiles, les mauvaises récoltes, la famines, semblent l'accuser. C'est donc une enfance douloureuse que subit Gondemar, chez qui le besoin de reconnaissance va vite laisser place à une haine sourde.

La seule personne qui trouve grâce à ses yeux, alors que les garçons du village le rejettent et l'insultent, est Pernelle, jeune femme boiteuse, au visage ingrat, qui devient rapidement son unique amie. Aussi, lorsqu'elle est victime d'un outrage sous ses yeux et qu'il ne peut la défendre faute de compétences, Gondemar laisse-t-il libre court à la rage qui l'étreint. Si son père n'est pas capable de défendre Rossal, il le fera. "Toute ma courte vie, j'avais eu à porter le stigmate de ma naissance. J'avais enduré la méfiance et la haine. J'avais payé pour un crime que je n'avais pas commis (...) C'était fini. Désormais, puisque le monde ne voulait pas de moi, je le rejetais".

Fort de cette décision, il suit assidûment l'enseignement prodigué par Bertrand de Montbard, ancien Templier, chevalier du Christ et désormais maitre d'arme ,que le seigneur de Rossal a engagé afin de défendre les lieux. Alors que Pernelle ne souhaite plus le voir, la tristesse se mêle à la rancoeur et Gondemar saisira sa chance en se vengeant de l'affront contre les brigands qui étaient venus semer la terreur.

Ce faisant, il ne sait les foudres qu'il abat sur la seigneurie et dont l'issue sera fatale à de nombreux innocents ... et à lui-même.

Désormais damné, Gondemar est contraint à errer, seul, jusqu'à ce que la Vérité lui soit révélée et qu'il accomplisse la mission qui pourra peut-être lui accorder le Salut.

C'est dans ces circonstances dramatiques, qu'engagé auprès des Croisés, il portera assaut contre les cathares , jugés hérétiques, à Béziers, se faisant ainsi le bras d'Arnaud Amaury, légat du pape, au nom de "Tuez-les tous, Dieu reconnaitra les siens !". Pourtant, se réveillant à Cabaret au milieu de ceux qu'il est venu combattre, il découvrira que la vie réserve bien des surprises et qu'il n'y a peut-être pas de hasard en ce monde ...

 

En vrac et au fil des pages ...

(Cabaret)

Voici une série à laquelle on peut vite devenir accro !

Dans un style à la fois fluide et richement documenté, Hervé Gagnon nous plonge au coeur de l'épopée cathare, à la suite d'un anti-héros à la fois rebutant et attachant : Gondemar de Rossal.

Les premières pages laissent le lecteur perplexe : nous apprêtons-nous vraiment à suivre l'aventure d'un assassin, d'un damné ? C'est en effet à travers son regard et donc à la première personne, que l'histoire nous est contée.

Les effets d'attente sont ménagés avec succès et nous contraignent à nous remettre en question : qu'attend-on ? Sera-t-il puni ? Mais alors que l'on croyait la route toute tracée ,l'auteur ne se lasse pas de créer des rebondissements.

il est difficile de parler des cathares sans réinvestir quelques approximations qui ont été véhiculées à travers d'autres écrits. Aussi ai-je été surprise de l'érudition de l'auteur qui, sans que cela ne devienne un documentaire indigeste, parvient à distiller des informations justes et intéressantes sur les cathares, leurs rites, leur vie quotidienne. Tout cela permet un côté visuel qui permet au lecteur de plonger dans l'aventure en n'ayant aucun mal à imaginer les lieux, l'habillement, les détails sur les soins, l'alimentation ...etc. On en apprend aussi beaucoup sur les Parfaits, leur rôle, leur dévouement et sur le fait que le corps ne serait qu'une enveloppe dont il faut se détacher et qui n'a que peu d'importance. Leur croyance les amène à penser que Jésus était tout simplement un homme et qu'il avait épousé Marie Madeleine, fondant une famille. L'idée que le diable soit une créature de Dieu qui se serait révoltée, les pousse à penser que les âmes sont libres d'exercer le Bien ou le Mal.Pour eux, la vénération du crucifix ne se justifie donc pas. 

Bien entendu la période se prête à la violence et elle apparait d'emblée à travers les sévices subis par Pernelle, la vengeance cruelle de Gondemar que l'on ne peut cautionner et qui lui sera d'ailleurs reprochée tout au long de ce premier tome, les assaut des croisés.

L'amitié qui est ici décrite prend une grande importance et l'on s'attache autant à Pernelle qu'au maitre d'arme, Bertrand de Montbard, pourtant bourru, qui ne se lasse pas de blasphémer ! J'ai particulièrement apprécié ce personnage qui devient en quelques sortes, la conscience de Gondemar et peut-être le père qu'il aurait aimé avoir, dur mais juste.

On retrouve dans ce premier tome une reflexion poussée sur la foi, les croyances de chacun, mais elle est faussée par le statut de l'Eglise qui ,en ce XIII°S, domine avec à sa tête le pape Innocent III. La violence est présente de tous côtés mais on ne peut que souscrire à la vision cathare. L'auteur sait nous la rendre sympathique, il est vrai, en soulignant le déchainement de haine des chétiens, Croisés en tête. La complexité des ordres devient claire sous sa plume . pourtant il touche à un sujet qui a fait polémique : les Templiers se tiennent aux côtés des hérétiques contre les Croisés, bien que n'ayant pas tous embrassé la foi cathare mais pour protéger l'innoncence et la Vérité. Ce point est parfois contesté par les historiens. Mais qu'importe, ici le parti pris est intéressant. Il est pourtant vrai que les Templiers et les Hospitaliers ne prirent quasiment pas part au massacre des cathares.

On touche ici le point crucial du roman , qui sera révélé à Gondemar un peu plus tard. La fameuse Vérité que les cathares auraient refusé de révéler même sous la torture. Hervé Gagnon a su exploiter ce filon afin de rendre à la fois crédible et intriguant le récit. C'est un peu comme la quête du Graal sur laquelle on a beaucoup glosé. ll faut reconnaitre que dès lors qu'on touche à un tel secret, le lecteur ne peut qu'être happé.

Une histoire addictive qui m'a poussée à poursuivre ma lecture avec le tome 2, d'autant que je me retrouve en terre connue puisqu'originaire du Sud et connaissant bien les places fortes dont il est question ( Montségut, Qéribus, Cabaret ...). ici on esquisse à peine le portrait de Simon de Montfort et Gondemar apprend à connaitre de grandes figures du catharisme, comme Esclarmonde de Foix qui prend vie sous la plume d'Hervé Gagnon, ce qui est sympathique car l'Histoire a retenu peu de choses de cette Parfaite.

 

 

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