Désolée, je suis attendue, Agnès Martin-Lugand

Désolée, je suis attendue, Agnès Martin Lugand, éditions Michel Lafon, 2016, 379 pages

Genre : contemporain

Thèmes : ambition, carrière, amour, solitude,

 

l'auteur en quelques mots ...

 

Agnès Martin-Lugand était psycho-clinicienne. Elle écrit Les gens heureux lisent et boivent du café, inspirée par un reportage sur une femme qui reconstruit sa vie après le décès de sa famille. Les maisons d’édition auxquelles elle adresse le manuscrit le refusent et elle s’auto-publie en numérique sur Amazon où elle vend son roman pour 0,89€. C’est un carton immédiat, elle en vend 10 000 exemplaires simplement grâce au bouche-à-oreille. Michel Lafon repère le best-seller et la contacte via sa page Facebook pour lui proposer un contrat d’édition.

En 2014 elle a publié son second roman, Entre mes mains le bonheur se faufile

La vie est facile, ne t’inquiète pas est son troisième roman qui parait en 2015.

 

Merci à Livradict et aux éditions Michel Lafon pour ce partenariat qui me permet de découvrir l'auteur.

L'histoire

 

Yaêl doit effectuer son stage de fin d'études en école de commerce et n'a pas l'ombre d'une piste. "Partisane du moindre effort", comme elle aime à se définir, elle ne trouve de plaisir que dans la pratique des langues étrangères. Lorsque l'agence d'interprète la prend pour quelques semaines, elle jubile : "aucune responsabilité, pas d'obligation de porter un tailleur, pas d'horaires tardifs non plus, et la possibilité de boire des cafés gratis et de retrouver tout la petite bande pour l'Happy Hour !"

Pourtant, à la fin du stage, Bertrand, sur qui elle a fait une forte impression, l'engage. Pour elle la voie est tracée, travailler quelques temps, juste pour économiser et se payer un tour du monde.

Côté coeur, Yaël est attirée par un des garçons de la bande, Marc. Lorsqu'il la raccompagne, le dernier soir, elle ne sait pas encore qu'elle ne le reverra que des années plus tard, en aura le coeur brisé et changera radicalement de vie.

Dix ans plus tard, Yaël est devenue redoutable en affaires, indispensable à l'agence d'interprète dans laquelle elle a pris du galon. Désormais sa vie n'est plus consacrée qu'au travail, rendez-vous d'affaires et son ambition démesurée n'a d'égal que la vie solitaire qu'elle s'est construite. Le peu de temps qu'elle prend pour visiter sa famille ne la satisfait pas : sa soeur et sa petite vie de famille épanouissante, des amis qui ne la comprennent plus ... "désolée, je suis attendue", s'excuse-t-elle inmanquablement pour justifier sa fuite.

Aussi lorsqu'elle retrouve Marc, par hasard, ses repères vacillent-ils ...

 

En vrac et au fil des pages ...

Difficile de voir évoluer au fil des pages une héroine en laquelle on ne se reconnait pas, toute dévouée au travail, ambitieuse, isolée parce qu'elle considère que tout écart pourrait la priver d'un poste qu'elle convoite et dans lequel elle pense s'épanouir.

Pourtant Yaël ne laisse pas le lecteur insensible et l'on se surprend rapidement à se demander quelles sont ses motivations, ce qui a pu à ce point la transformer. La jeune fille naive et insouciante du premier chapitre, incapable de se vâtir correctement pour un emploi, se révèle une working girl en talons hauts, tirée à quatre épingle, ne laissant personne piétiner ses plates bandes, certainement pas ces hommes d'affaires qu'elle juge machos.

De ce point de vue le récit et bien construit, qui nous présente la jeune femme au sortir des études, insouciante, libre, l'opposé de ce qu'elle est devenue. Sa vie aseptisée inquiète mais l'auteur a su transmettre le côté rassurant que cela peut représenter pour une personne dont la vie sociale est inexistante. Les rituels que Yaël met en place pour faire de ses journées un parfait enchainement au service de son travail, relèvent de tocs. On comprend alors que cela cache une douleur volontairement enfouie, une forme d'abandon dont elle ne s'est remise qu'en se lançant un défi : ne compter que sur elle-même et laisser de côté l'émotionnel.

Evidemment les thèmes sous-jacents apparaissent : comment guérir d'une blessure ? faire à nouveau confiance à autrui ?

L'évolution de Yaël tout au long du roman est comme un retour aux sources, guidé par un autre personnage qui a lui aussi fait son chemin, Marc. Deux mondes les oppose, celui de l'argent, de l'apparence et du mensonge d'un côté, celui de la simplicité, de l'authenticité des sentiments de l'autre.

La famille n'est pas épargnée et l'on découvre le regard que posent les personnes qui l'aiment sur Yaël, essayant de la comprendre, au moins de respecter ce qu'elle est devenue. Peut-on vivre sous une carapace et se leurrer à ce point sur ce qui nous entoure ? C'est ce à quoi répond Agnès Martin Lugand en faisant évoluer une héroine qui s'est construit un monde et ne voit que ce qu'elle veut voir.

L'univers de l'entreprise n'est pas épargné, la pression, les objectifs et la tension qui en découle. Le sexisme qui permet aux hommes des remarques déplacées est aussi abordé sous un autre aspect à travers les travers que l'on projète sur les hommes. Yaël découvrira que certains personnages qu'elle pensait macho sont en réalité bien plus en phase qu'elle avec leur vie quotidienne.

L'écriture est simple, quotidienne, ce qui permet au lecteur, sans doute, de plonger rapidement dans l'histoire, d'y retrouver des clins d'oeil à sa propre vie ou de trouver crédible le portrait qui nous est dressé des personnages.

 

Merci à Livradict et aux éditions Michel Lafon pour ce partenariat qui me permet de découvrir l'auteur.

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