La Malédiction d'Old Haven, Fabrice Colin, éditions Albin Michel, 2007, 637 pages

Genre : fantasy

Thèmes : sorcellerie, femmes, malédiction, Inquisition

 

L'auteur en quelques mots ...

Retrouvez la biographie de Fabrice Colin sur le billet consacré à Confessions d'un automate mangeur d'opium

L'histoire :

Comme le veut la coutume, Mary quitte le couvent dans lequel elle a grandi ,à l'âge de dix sept ans. Quelque peu effrayée à l'idée de ce qui l'attend dehors, elle sait aussi qu'elle trouvera là sa liberté. C'est donc loin de Gotham qu'elle s'apprête à trouver un emploi et à voler de ses propres ailes. Pour tout bagage elle emporte son amulette et un tableau qu'un mystérieux donateur a remis au couvent à son nom et qu'elle ne peut regarder sans un sentiment de malaise, comme si la toile l'appelait.

Philip, le cocher qui l'accompagne, a pour mission de l'amener à Boston où commencera sa nouvelle vie. Cependant, en chemin, une force inconnue guide la jeune femme vers un village, Old Haven, qu'elle croit reconnaitre. Le révérend Caleb semble désireux de la retenir en ces lieux et lui propose immédiatement l'asile en échange de quelques corvées. Pourtant, Mary va bientôt découvrir que ce personnage énigmatique éprouve pour elle une attirance étrange, proche de la folie.

Ce n'est que lorsqu'elle pénètre dans la clairière et aperçoit l'arbre qu'elle a vu en rêve que la jeune femme comprend que Old Haven était bien sa destination. Un groupe d'habitants s'attache à lui construire une maison en ce lieu qui l'appelle, tout en la mettant en garde contre Caleb.

Pourtant, ce dernier n'est pas le plus grand danger auquel Mary va devoir faire face et lorsque les troupes de l'Inquisition arrivent au village, ce sont toutes ses croyances qui s'écroulent. Dès lors la vie de Mary se transforme en une course effrénée qui va mettre sur son chemin des êtres plus étonnants les uns que les autres : sorcières, pirates, esclave, jusqu'à l'Empereur qui voit en elle l'objet de son salut.

A des années de là, une sorcière portant le même nom de famille que Mary a été brûlée en ce même lieu, liée à la jeune femme par un lien de parenté qu'elle s'apprête à découvrir...

 

En vrac et au fil des pages ...

On peut lire La Malédiction d'Old Haven sans en connaitre les références, néanmoins les influences de l'auteur sont si visibles qu'il est difficile de passer à côté (Lovecraft, Hawthorne ...)

La ville de Gotham ( surnom donné à New York) a été construite sur une cité obscure faite de souterrains dans lesquels vivent des créatures issues des ténèbres, femmes qui ont sacrifié leur vie et sont devenues des monstres. Dès lors, la ville prend une dimension de personnage, habitée, vivante et terrifiante. Elle n'est pas la seule à porter un nom symbolique puisque Mary parcourt également les rues de Salem au cours du récit. Le ton est donné !

Le roman reprend les codes du fantastique : l'idée qu'il existe un monde de l'autre côté du Voile, que l'on peut traverser en pensée; le pendant, le miroir de ce monde dans le côté obscur. Mais l'auteur joue avec les références en mettant en scène aussi bien Jack o Lantern que Jonathan Swift ! On sent donc dans l'écriture qu'il prend du plaisir à les mêler dans un récit qui se présente sous la forme d'une chasse aux sorcières menée par l'Inquisition.

Nous sommes au XVIII°S mais quelques éléments nous transportent immédiatement dans l'univers de la fantasy, les distorsions spatiales, les automates, les engins volants, les dragons, les machines à vapeur ...

En Mary j'ai retrouvé les traits de l'héroïne dans Animale : La malédiction de Boucle d'or de Victor Dixen, certains éléments de l'histoire se recoupant ( la sortie du couvent, le caractère aventureux et fort de l'héroïne, l'attachement à sa mère, sa lignée, la découverte par le mode épistolaire de la vie de ses aïeules...). Malgré son jeune âge et son apparente naiveté, Mary se présente comme une héroine qui comprend rapidement quel est son destin et s'y soumet, quelles que soient les conséquences. je peux comprendre les avis mitigé sur cette jeune femme qui agit parfois de façon totalement égoiste ( en amour essentiellement) ou semble être aveugle à certains signes qui nous font deviner ce qu'elle ne voit pas.

Le récit est mené tambour battant, toutefois quelques longueurs empêchent de réellement se projeter,. Je pense que cela tient essentiellement aux descriptions, aux explications qui impriment un rythme plutôt lent au récit alors que Mary joue sa vie, son destin. Il faut dire que l'oeuvre est un pavé, peut-être faut-il le lire en plusieurs fois pour le rendre plus trépidant. Pour ma part j'avais hâte de comprendre le thème du double, largement développé dans ce récit avec le pendant obscur de personnages, la ville et son envers, les contradictions de l'Empereur, fasciné par le Bien mais happé par le Mal, les mondes en miroir... C'est ce qui m'a le plus intéressée car cet aspect est bien développé.

Je vous recommande ce récit malgré les petits bémols qui n'empêchent pas de longer dans cet univers fascinant.

 

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