La Horde du contrevent, Alain Damasio
La Horde du contrevent, Alain Damasio, Editions La Volte, 2004, 521 pages
Genre : fantasy
Thèmes : vent, amitié, horde, écueils, quête, musique
L'auteur en quelques mots ...
Alain Damasio, né Alain Raymond, est un écrivain français de science-fiction. Il choisit ce patronyme en l'honneur de sa grand-mère Andrée Damasio.
Sorti de l'ESSEC en 1991, il choisit de s'isoler (d'abord dans le Vercors puis à Nonza, en Corse) pour s'adonner à l'écriture. Son domaine de prédilection est l'anticipation politique. Il marie ce genre à des éléments de science-fiction et/ou de fantasy.
Jeune, il écrit de nombreuses nouvelles. Son premier texte long est "La Zone du dehors", roman d’anticipation qui s’intéresse aux sociétés de contrôle sous le modèle démocratique (inspiré des travaux de Michel Foucault et Gilles Deleuze). Publié sous une nouvelle version en 2007, il est récompensé du Prix Européen Utopiales.
Son second livre est récompensé par le Grand Prix de l'Imaginaire 2006 dans la catégorie Roman. Il s'agit de "La Horde du Contrevent" (roman accompagné d'une BOL - Bande Originale de Livre - composée par Arno Alyvan), véritable succès public qui s'est vendu à plus de 50 000 exemplaires.
En 2008, il pose sa voix sur un morceau de Rone: Bora feat Alain Damasio vocal mix; et il travaille actuellement sur un jeu vidéo d’action-aventure développé par la société DONTNOD Entertainment.
En 2009, il écrit "La Rage du Sage" (essai politique et poétique sur notre époque) pour le single gratuit Memento Mori du groupe SLIVER.Folio SF publie en 2014 "Aucun souvenir assez solide," compilation de nouvelles écrites par Damasio.
En 2016, il livre un nouveau texte politique, Le dehors de toute chose, qui décrypte l’hégémonie du contrôle dans nos vies.
Un petit mot sur ...
Arno Alyvan est le compositeur de la bande son du livre. Et oui, les éditions La Volte ont eu l'ingénieuse idée de joindre au roman d'Alain Damasio la musique composée ,sur mesure, par Arno Alyvan et qui colle parfaitement avec les sonorités, le rythme de l'auteur. A découvrir ici
L'histoire:
" A l'origine fut la vitesse, le pur mouvement furtif, le "vent foudre".
Puis le cosmos décéléra, prit consistance et forme,jusqu'aux lenteurs habitables, jusqu'au vivant, jusqu'à vous.
Bienvenue à toi, lent homme lié, poussif tresseur de vitesses."
Ils sont vingt -trois et constituent la vingt -quatrième Horde. Chacun son rôle, formés pour traverser cet espace infini battu par des vents fous, à la recherche de l'origine du vent. Ils ne sont pas les premiers à tenter de joindre ainsi l'Extrême Amont. Tous espèrent qu'un jour, une horde sera capable, grâce au travail des précédentes, d'atteindre cette limite et ainsi justifier les efforts et les espoirs de tous.
Chaque horde a apporté son lot d'avancées, comme les notations sur les vents, consignées par des sigles en un système organisé, imaginé par le scribe de la huitième horde, Focc Noniag.
Leur force : le lien indéfectible qui les unit. Face à eux un vent indescriptible, destructeur et en même temps la raison d'être de la horde. Dans le périple qui bouscule hommes et femmes, la solidarité est indispensable, une nécessaire bouffée face à la peur qui les étreint. Car l'homme est un infime grain de sable , résistant pourtant.
Que d'obstacles, de rencontres, avant de ...
En vrac et au fil des pages ...
Parce que je suis entrée en fantasy avec le challenge de Licorne, il fallait pour cette édition que j'aille un peu plus loin et tente un récit sur lequel les avis sont unanimes. Nous voici rendus aux confins du genre, un univers à part entière, entièrement créé par l'auteur, paysages et langage compris !
C'est tout d'abord une expérience visuelle : des mots, des bribes de phrases jetés sur une page, comme balayés, illisibles, comme effacés par le vent.Puis les phrases se reconstituent et l'on entend dans les sonorités, le vent qui souffle entre les lignes ( ffff, vvvv, sssss !).
C'est ensuite une immersion totale dans une langue que l'on comprend sans la connaitre, une sorte d'argot mêlé de néologismes. Invention d'une langue pour la Horde où chacun a un rôle à jouer, ou chaque personnage est matérialisé par un signe et prend la parole pour raconter le périple, décrire un compagnon, revenir sur les siècles passés qui ont vu la naissance des groupes qui se sont succédés, à la recherche de l'origine de ce vent fou.
L'expérience est totale si vous écoutez en parallèle, les musiques composées sur mesure par Arno Alyvan, qui aident à plonger dans l'univers d'Alain Damasio, sont une interprétation bien entendu, mais m'ont été bien utiles lors de certains passages.
Car, il faut bien l'avouer, je ne suis pas lectrice de fantasy et suis probablement allée trop loin dans l'expérimentation du genre. ii tout est complexe, travaillé, réfléchi et les amateurs n'auront aucun mal à situer l'univers décrit, en référence à d'autres qu'ils ont pu découvrir lors de leurs lectures. Pour moi, le manque de références visuelles a été un frein. Imaginer un tel univers est à la fois personnel et demande une imagination proche d celle de l'auteur. Autre écueil : le nombre de personnages qui fait que l'on s'attache à certains mais en oublie d'autres. On me dit que les éditions Folio ont joint un marque page reprenant les signes de chaque personnage et permettant de mieux s'y retrouver. Il vous faudra, lecteur, faire un mix entre les éditions pour obtenir un récit complet et riche !
J'ai en revanche beaucoup apprécié le travail sur la langue, le phrasé. Chaque phrase est un souffle, chaque personnage typé, si bien que l'ensemble laisse déjà entendre une musique, celle du vent que l'on sent à chaque page. C'est assez extraordinaire d'être ainsi parvenu à recréer ce que l'on entend. C'est une langue puissante, qui emporte.
Finalement, se laisser porter est la meilleur solution, bien que des éléments nous interpellent régulièrement, comme cette pagination à rebours, ces petits signes que l'on retrouve partout...
Il faut le lire pour comprendre et il est difficile d'en parler. Le vent ici est protéiforme et l'auteur a su en faire le personnage principal. Alain Damasio joue en outre avec nos émotions, livrant au lecteur tantôt de purs moments de poésie, tantôt des passages plus durs, violents.
"Nous sommes faits de l'étoffe dont sont tissés les vents"