Loin de la foule déchaînée, Thomas Hardy
Loin de la foule déchainée, Thomas Hardy, éditions Archi Poche, 2015, 470 pages
Genre : classique
Thèmes : Angleterre, XIX°S, domaine, mariage, amour, statut social
L'auteur en quelques mots ...
Retrouvez la biographie de l'auteur sur le billet Deux contes du Wessex
L'histoire :
Gabriel Oak est un fermier respectable qui a repris l'exploitation de son père. Bien installé à Norcombe Hill, "infatigable au travail et levé dès l'aurore", il possède à 28 ans, un bien qui lui permettrait de prendre une épouse. Ce n'est pas la jeune femme qui arrive alors en chariot, prête à s'installer dans cette ville, qui fera l'affaire. Vaniteuse, elle se présente sous les traits d'une jeune femme insoumise, fière de sa beauté. Pourtant Gabriel tombe sous son charme. Il faut dire que Bathsheba Everdene n'est pas une femme ordinaire, aime effectuer une partie du travail d'une ferme, sait monter à cheval.Sans le sou, elle le repousse pourtant pour d'autres raisons, jouant au jeu du chat et de la souris
Mais "l'amour est un usurier exigeant" et lorsque Bathsheba quitte la ville pour se rendre sans explications à Weatherbury, Gabriel se rend compte qu'il ne pourra l'oublier. Le sort se charge de le convaincre que cette union était impossible : un des chiens dressé pour surveiller le troupeau, et qui montrait depuis quelques temps des signes de désobéissance, affole les brebis et les contraint à se jeter dans la carrière. Ruiné, Gabriel quitte à son tour Norcombe.
A quelques temps de là, rendu à Weatherbury en tant que simple berger, il retrouve Bathsheba dans une situation inédite. Ayant hérité de son oncle, la jeune femme est désormais à la tête d'un vaste domaine. Ne pouvant la reconquérir, il assiste, impuissant, à la cour que lui font d'autres hommes...
En vrac et au fil des pages ...
Quel plaisir de retrouver la plume de Thomas Hardy. Son style est reconnaissable par les intrusions de l'auteur dans son récit et l'humour qu'il y insère, petites piques sur la société contemporaine.
L'Angleterre rurale est le décor favori de l'écrivain qui rend ainsi hommage au dur labeur des fermiers, berger et autres paysans. Pour ceux qui connaissent, Thomas Hardy, on retrouve avec plaisir les paysages vallonné du Wessex, région imaginée par l'auteur, inspirée de son enfance
Le personnage de Bathsheba se révèle fort, malgré une première rencontre placée sous le signe de la vanité, qui vaut à Thomas Hardy une remarque cinglante : "Ce n'était pas précisément la faute de la cabane, observa la jeune fille d'un ton qui prouvait que, chose assez rare chez une personne de son sexe, elle savait achever sa pensée avant de commencer une autre phrase". Rapidement, elle devient une fermière avertie, une femme d'affaires, ce qui est rare dans l'Angleterre victorienne du XIX°S.Elle se revendique comme une femme libre et entend mener sa vie sans se retrouver sus la coupe d'un homme. Pourtant, pour les belles moustaches du sergent Troy, elle se retrouvera dans la situation de ces jeunes filles qu'elle dénigre.
Mais il n'est pas tendre non plus avec les personnages arrogants, comme le sergent Troy, joli coeur qui utilise les femmes puis les rejette, "Il n'ignorait pas le pouvoir des flatteries adroites et son expérience lui avait appris qu'envers le beau sexe, il n'y a pas d'autres alternatives que les compliments ou les jurements." traitez-les avec égards, disait-il, et vous êtes un homme perdu".
Chaque personnage porte en lui une vision de l'amour qui lui est propre mais va être mise à mal.
Par ce biais il nous rend sympathique le fermier Oak au grand coeur, nous pousse à détester Troy, à plaindre Boldwood qui fera les frais de la plaisanterie de Bathsheba et à apprécier peu à peu la jeune femme que l'on voit changer, évoluer, réfléchir au fil des pages, bien qu'elle se comporte souvent comme une ingénue que l'on souhaiterait gifler ! Mais il faut dire, pour sa défense, que ce roman est aussi un récit d'apprentissage, éducation sentimentale d'une jeune femme qui se voit propulsée rapidement ) la tête d'un domaine, avec des hommes sous ses ordres.
Je n'ai pas vu l'adaptation de Vinterberg et espère qu'elle rend compte du regard particulier de Thomas Hardy sur l'Angleterre du XIX°S.