Aujourd'hui Hilde et Lou nous invitent à publier un billet autour du cinéma.

                                                            Séquence souvenirs : 

Je me souviens qu'ado j'aimais me faire peur, aller au cinéma voir des films d'horreur ou des films fantastiques.

Je me souviens que ma maman m'a accompagnée lors d'une séance. J'ai alors découvert qu'elle était fan de ce genre ! C'était en 1986 pour Poltergeist 2

Je me souviens que cette période a duré quelques années, le temps de lire et voir du King (Simetière, Shining, Christine ...) puis que je suis passée à autre chose.

Je me souviens être tombée dans le fantastique grâce à Nosferatu de Murnau que j'ai adoré ! Depuis je n'imagine pas de vampire avec un autre visage que celui de Max Schrek

                                                              

                         

Je ne suis pas particulièrement fan de vampire, surtout dans les romans. Je les trouve souvent trop stéréotypés. Pourtant récemment, j'ai lu Le Livre perdu des sortilèges et j'ai apprécié Matthew ( malgré son petit côté scintillant ! ).

La figure de Dracula m'a néanmoins toujours interpelée. Le décor y est sans doute pour quelque chose : les carpathes ,ces contrées pétries de légendes, froides, sombres et inaccessibles...

Je ne garderai donc pour ce billet que le cinéma de origines, la première apparition du vampire à l'écran et ce qui a fondé le mythe.

A l'origine ...

Le vampire apparait à l'écran avec le cinéma muet, mais c'est en 1922 avec Nosferatu de Murnau que cette figure acquiert ses lettres de noblesse.

Il a fallu attendre 1937 pour que le film soit largement diffusé. Il faut dire qu'il s'agit d'une libre adaptation du roman Dracula de Bram Stoker qui a valu à Murnau un procès. Il faut dire que de nombreux traits dévient par rapport au roman, à commencer par Van Helsing qui n'est ici qu'un personnage secondaire. Pourtant il s'agit bien là de l'oeuvre cinématographique qui va poser les jalons du cinéma de "vampire" et imprégner par la suite bien des oeuvres.

A partir de ce film, le vampire sera à jamais la créature qui craint les rayons du soleil, recèle une part d'animalité en lui et vit dans l'ombre. Comme dans la littérature des origines, il apparaît cadavérique, ce qui sera sa marque de fabrique pendant longtemps. On lui prête une vie nocturne, mais Dom Calmet bouscule cela dès le départ avec la description d'un être insatiable sévissant de jour comme de nuit.

Mais ce qui m'intéresse chez Murnau, aujourd'hui que nous n'avons que l'embarras du choix question vampires, c'est le soin esthétique apporté à l'image. Je ne me lancerai pas dans une analyse de l'expressionnisme allemand, mais il faut bien dire que c'est là que nait le vampire tel qu'il est représenté dans l'imaginaire collectif. On jour sur la peur, qui est filée tout au long du film. 

Replaçons les choses dans leur contexte : la guerre est passée par là et la représentation du Mal, du côté obscur de l'humain, la créature qui sommeille en lui, permet également d'exorciser une forme dérangeante de bestialité. C'est donc l'état psychologique d'un pays ( l'Allemagne) qui se reflète dans cette forme d'art.

La part psychanalytique du film est aussi importante, le vampire symbolisant la part d'ombre mais aussi de désir, l'inconscient révélé.

Dans cette version de Murnau, les décors sont très travaillés, déformés. Il ne semble pas réalistes et l'on est au coeur du fantastique, ce qui est également travaillé dans les récits du XIX°S. De ce contraste nait un côté dérangeant pour le spectateur, qui est tout de suite placé dans l'ambiance. Le jeu d'ombres permet de révéler l'ambiguité, le double des personnages. On pourra objecter que le jeu des acteurs n'est pas crédibles, mais ce n'est pas la volonté du réalisateur. On est ici dans quelque chose qui approche la chorégraphie.

Ce que j'aime également c'est le rapport à la littérature, avec ces écrits qui scande les séquences. En effet, comme dans l'oeuvre de Stoker, les lettres, le journal de bord , sont retranscrits.

Chaque fois que je regarde ce film, surtout les scène de jeux d'ombres ou les griffes semblent s'étirer, je me dis que ce film a forcément eu une influence sur Tim Burton !

 

En 1927, Tod Browning sort London after Midnight dans lequel le vampire prend les traits d'un séducteur, autre caractéristique inquiétante qui perdurera. Cela deviendra une pièce de théâtre; Dracula,  à huis clos ou presque, avec un sous entendu sexuel revendiqué mais qui ne sera pas toujours retenu dans la critique. Le côté mysogine en revanche apparaît clairement.

C'est la naissance du vampire dandy au fort accent slave !

La figure du vampire n'a cessé d'évoluer depuis, mais pour moi ces versions originales en noir et blanc restent la base du genre.

Il ne faut pas les regarder en spectateurs passifs, car on aurait tendance alors à trouver les effets spéciaux ridicules ! Mais se demander quel message est véhiculé, quelle forme de vampire, et le replacer dans un contexte, une époque.

A partir de 1945 le vampire se retrouvera dans des comédies et la firme Universal abandonnera ce qui a fait sa force : le monstre sombre, énigmatique. L'aspect gothique , hérité de la littérature du XIX°S, qui a tant plu parce qu'il correspondait à une époque source d'inquiétude, ne fonctionne plus.

1958, on n'hésite pas à montrer le sang qui coule à la morsure, comme c'est le cas dans Le Cauchemar de Dracula. Les choses sont plus assumées et le lien avec le sexe évident à cette période. La morsure est filmée comme une véritable dévoration de la victime . Eros et Thanatos s'entremêlent.C'est Christopher Lee qui deviendra le symbole de ce personnage gothique dans la version de Terence Fisher.

Il faut avouer que l'on s'éloigne du roman de Bram Stoker avec cette version. Mais le film est devenu culte par son approche, les scènes qu'il propose. C'est aussi l'émancipation de la femme qui, de soumise ( mais il faut comprendre le contexte du roman de Bram Stoker) devient fatale. Dracula est la créature qui enfreint les règles de la société élisabéthaine, la bien-pensance .

On retrouve Peter Cushing dans le rôle de Van Helsing, incroyable rôle qui le marquera.

J'ai souvent entendu des critiques disant que ce film en couleur était trop criard. Je pense pour ma part que la firme a voulu au contraire appuyer sur le côté horreur, sans doute pour casser les codes d'un autre Dracula en noir et blanc qui, lui aussi, jouait sur le contraste. Ici on est dans l'excès, mais c'est assumé.

 

Retour aux origines du récit

La dernière version que j'apprécié est le Dracula de Coppola. Ici le réalisateur a voulu rester fidèle au roman de Bram Stoker.

Son Dracula est donc, comme dans le roman, allergique à l'ail, peut être mis en fuite avec une croix, prend la forme d'une chauve souris ou encore d'un loup-garou (notez que désormais il s'agit de deux familles distinctes dans les oeuvres actuelles) et n'a pas de reflet.

Mais Francis Ford Coppola est allé encore plus loin, en faisant entrer le cinéma dans le cinéma. Le clin d'oeil à Nosteratu est plus qu'évident avec les griffes mais aussi l'ombre du vampire qui est une entité à elle seule, ou encore l'aspect saccadé de certains scènes, l'arrivée du navire...etc. On retrouve également le Dracula à l'accent slave qu'avait développé Tod Browning. Enfin une référence au Cauchemar de Dracula de Terence Fisher avec des gros plans sur les canines qui poussent avant de mordre.Autant d'hommages aux films de vampire des origines.

Mais Gary Oldman incarne un nouveau Dracula en lui donnant une nouvelle personnalité.

On pourrait aller beaucoup plus loin dans l'analyse car Coppola a finalement rendu hommage au cinéma dans sa globalité en reprenant par exemple des séquences de vieux films, en filmant de la même façon par moment que dans les films muets. Bref, il faudrait plus de temps pour vous en parler mais ce sujet me passionne ! Il faut dire que je le travaille avec mes élèves ,qui sont au début réticents, mais finalement adorent ces comparaisons  et l'histoire du cinéma.

Finalement ce film se démarque par son esthétique, l'aspect rouge qui est filé tout au long du film, l'enchainement des scènes avec des fondus au noir. Puis l'originalité est le fait que le réalisateur insiste sur l'histoire d'amour entre Dracula et Mina. On peut dire que le Comte est le révélateur de la féminité de Mina qui s'émancipe à son contact alors qu'elle paraissait une petite chose fragile aux côtés de Harper.

C'est une version que j'apprécie particulièrement.

 

Ce qui me plait c'est le fait que chaque film est aussi révélateur d'une époque. C'est ce qui arrive à la figure du vampire, qui est finalement devenue un temps un être scintillant dans Twilight. Il faut plaire à un public mais il est bon de revenir à la base de temps en temps. J'aime les vampires gothiques, ténébreux, dans les romans. Le vampire dandy en quelques sortes. Au cinéma je n'ai jamais adhéré aux diverses versions vues ( Entretien avec un vampire, Le Bal des vampires, Twilight...) en dehors de Nosferatu et Le Cauchemar de Dracula.

Et vous, quel est votre vampire préféré au cinéma ?

 

 

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