La Mer en hiver, Susanna Kearsley

La Mer en hiver, Susanna Kearsley, éditions Pocket, 2017, 576 pages

Traduit par Marie-Axelle de La Rochefoucauld

Genre : romance historique

Thèmes : réminiscences, généalogie, révolution jacobite, Ecosse.

 

L'auteur en quelques mots ...

Susanna Kearsley a étudié la politique et le développement international à l'université, et a travaillé comme curatrice dans un musée. Son premier roman, Mariana, a remporté le prestigieux Catherine Cookson Literary Prize, et lancé sa carrière d'écrivain. Elle a continué à mélanger histoire et paranormal dans The splendour falls, Named of the dragon, Shadowy horses et Season of storms. Elle écrit également des thrillers sous le nom d'Emma Cole. source

L'histoire :

" Ce n'était pas par hasard. Rien de tout cela n'était arrivé par simple hasard"

Alors qu'elle circule sur les routes écossaises , quittant Aberdeen pour se diriger vers le nord où l'attend son amie et éditrice Jane, Carrie McClelland se retrouve sur un chemin qui la mène à un château en ruines, Slains. Surplombant les falaises, ce lieu l'attire irrémédiablement, sans qu'elle puisse expliquer ce qui la lie à ces vestiges. Une première rencontre avec un homme, la trentaine, qui promène son chien Angus, lui donne envie de rester en ce lieu. Mais ses obligations l'appellent et la route vers Peterhead est encore longue.

Partie pour la France quelques semaines plus tôt, Carrie avait entrepris d'écrire un roman historique plaçant au centre de l'intrigue le château de Saint Germain en Laye, refuge des rois d'Ecosse sous Louis XIV. C'est là que les soulèvements jacobites avaient vu le jour. C'est aussi là qu'elle avait choisi Nathaniel Hooke comme personnage principal, rebelle irlandais venu placer sa fidélité devant le roi Jacques jusqu'à son exil.

Pourtant, alors qu'elle commence à découvrir la région écossaise de Peterhead, Carrie, qui n'est pas venue pour écrire mais pour prendre du recul, se voit contrainte de poser sur le papier les mots qu'elle perçoit. Car ses personnages semblent lui parler, demander à vivre sur le papier comme ils ont vécu au XVIII°S. Rapidement, la trame qu'elle avait prévue s'efface au profit d'une jeune femme, Sophia, issue de sa propre famille, qui en 1708 se voit contrainte de quitter son foyer et un oncle malfaisant pour être placée par le Duc d'Hamilton chez la comtesse d'Erroll, au château de Slains. Ce refuge bienvenu lui permet de croire en une nouvelle vie, même si en ces temps troublés les conversations tournent autour d'une révolte visant à faire revenir Jacques Stuart sur les terres écossaises.

Au fil des jours, l'existence de Carrie se lie de façon surprenante à celle de Sophia, comme si son ancêtre la guidait, lui montrait le chemin qui fut le sien et l'aventure incroyable de sa vie. Alors qu'elle découvre peu à peu dans les livres de la bibliothèque ou ceux de son père, que ses prémonitions sont fondées, Carrie fait la connaissance de Graham, professeur d'université, féru d'Histoire et dont les traits lui inspirent le personnage de John Muray, prétendant de Sophia. A moins que John et Graham aient aussi des points communs ?

Ce qui passait pour des détails de l'intrigue devient alors parti prenante de la vie de Carrie ...

En vrac et au fil des pages ...

Château de Slains, Ecosse

Je n'apprécie les romances que lorsqu'elles ont un fond historique riche. C'est bien le cas avec La Mer en hiver que je vous invite à lire.

Passons sur les détails qui fâchent et les quelques facilités qui mènent à la fin du roman, pour nous concentrer sur l'originalité de ce récit. L'idée de l'auteur est de permettre à Carrie, jeune écrivain, de vivre ou ressentir les émotions de ses ancêtres, en particulier Sophia, dont on ne sait presque rien dans sa famille. C'est ici que se met en place la "mémoire génétique". Une belle trouvaille qui permet de redonner vie à des sensations enfouies, d'expliquer un sentiment de déjà vu ou une attirance pour un lieu alors qu'on ne l'a jamais exploré.

C'est dans ce contexte que Carrie découvre la région d'Aberdeen. Hébergée par un homme simple, Jimmy, dans un cottage de Cruden Bay, elle se sent immédiatement à l'aise en ce lieu. Pourtant, une sensation malsaine semble l'entourer lorsqu'elle se promène au bord des falaises, comme si elle pressentait un drame. Au fil des jours, l'envie d'écrire la tenaille par la force de personnages qui s'invitent dans son esprit et semblent revivre leur propre histoire. Carrie retranscrit alors les dialogues et agence les pièces du puzzle en reconstituant l'Histoire grâce à son père, féru de généalogie, au docteur Weir ou encore Graham, professeur d'université qui enseigne justement cette période à ses étudiants.

Le récit mêle donc deux voix, celle de Carrie et celle de Sophia, jusqu'à ce que, passée la moitié du roman, les deux histoires s'entremêlent de façon plus fluide, en écho. L'amour de Sophia pour John trouve son pendant dans la relation de Carrie et Graham, mais bien plus encore...

L'autre originalité est de nous donner à voir le travail de l'écrivain, les heures d'écriture quotidienne, les petits rituels, mais aussi la façon dont l'imagination intègre les personnages, les lieux, en laissant les protagonistes se créer leur vie propre.

Bien évidemment cette période historique me plait, et j'ai d'ailleurs lu de nombreux livres traitant de cela. Comme un écho à d'autres lectures comme Les Maitres d'Ecosse par exemple, Susanna Kearsley évoque William Walace, Robert Bruce ... Mais j'ai tout de même découvert la bataille de Malplaquet (1709). Mais ici c'est le malheureux incident de 1708 qui est rapporté, Jacques Stuart ayant embarqué avec 30 navires français, forcé de se rendre devant la Royal Navy. Evidemment l'histoire écossaise est un peu difficile à suivre et les noms des rois successifs de la branche Stuart n'aide en rien, ce que souligne l'auteur avec humour en disant que tous se prénomment James ou Jacques. C'est bien de Jacques François Stuart dont il est question ici ! 

Les paysages sont magnifiquement décrits et l'n n'a aucun mal à se transporter le long des falaises écossaises, guettant un navire français...

Je vous invite à découvrir ce récit bien amené, fluide et pertinent.

 

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