Une Femme simple et honnête, Robert Goolrick

Une Femme simple et honnête, Robert Goolrick, éditions Pocket, 2011, 354 pages

Genre : roman contemporain

Thèmes : amour, vengeance, pardon, mensonge, drame Etats-Unis

Traduit de l'américain par Marie de Prémonville

 

L'auteur en quelques mots ...

Retrouvez la biographie de l'auteur sur les billets précédents :

Arrive un vagabond

Féroces

 

L'histoire :

Wisconsin, automne 1907." Le froid était glacial, l'air électrique, chargé de tout ce qui allait advenir".

Le train était en retard mais Ralph Truitt était bien à l'heure. Quelques semaines plus tôt il avait passé une annonce. Vingt ans auparavant il avait perdu sa femme et ses enfants, ses rêves. Cela l'avait rendu autoritaire, impitoyable et il était connu pour cela en ville, même si les femmes espéraient pour lui une nouvelle vie. Car chacun guettait sa réaction lorsque celle qu'il attendait descendrait du train. "Tant d'années de haine, de fureur et de regret".Dans on esprit, les années de privation, de solitude, avaient laissé place à une sorte de pensée obsédante, "les noeuds de la mort et de la naissance dessinaient une dentelle folle, qui enceignait la ville dans ses rets, dans l'extase d'actes sexuels et dans le produit de ces actes. Tous peau contre peau dans l'obscurité, contenus pendant le jour par les lourds habits de torture"."Son désir ardent, sa solitude vorace n'étaient pas morts". Dans sa poche la réponse de cette femme, inconnue encore qui se présentait comme "une femme simple et honnête", souhaitant une nouvelle vie et capable de l'épouser.

Dans le train qui l’amène vers Ralph, "Catherine Land s'appliquait à défaire tout ce que la vie d'avant avait fait d'elle". Chez elle plus de pitié: "je suis de ces femmes qui veulent connaitre la fin de l'histoire". Ses habits de courtisane remplacés par une robe simple, elle apparaît alors sur le quai. Mais lorsque Ralph l'aperçoit il comprend que ce n'est pas elle. Catherine Land telle qu'elle se présente devant lui n'est pas celle qui apparait sur la photographie envoyée...

Qui est-elle ? Que veut-elle ? Et dans la vie qui les attend, pourra-t-il tout lui pardonner ?

"Ces choses-là arrivent"

En vrac et au fil des pages...

 

Dans les remerciements en fin d'ouvrage, Robert Goolrick rend hommage à Michael Lesy, pour son roman Wisconsin Death trip qui dresse le portrait d'une petite ville à la fin du XIX°S. Ce qu'il décrit marquera profondément notre auteur, le côté sombre et tourmenté des habitants des campagnes, loin du tumulte qui embrasait alors l'Amérique industrielle. C'est ce décor qu'a choisi Robert Goolrick pour Une Femme simple et honnête."ce Wisconsin gelé en plein coeur de l'hiver".

C'est donc un récit à la fois sombre et envoûtant, que nous livre l'auteur. On y rencontre un personnage austère, Ralph, que la vie a rendu aigri et qui nous est peu sympathique au début du récit. Pourtant, rapidement, nous allons comprendre ses failles, comme va le faire Catherine dans une autre intention cependant.

On s'intéresse alors à cette femme, ses motivations. Elle qui a répondu à l'annonce puis a caché de qu'elle était pour rejoindre une vie monotone, dans une campagne hostile. Que cherche-t-elle ? Rapidement elle nous est rendue antipathique car l'on devine une certaine fausseté sous ses motivations. Les rôles s'inversent. Ralph se montre attentionné, patient, bien que meurtri par cette femme qui est désormais la sienne mais qu'il ne connaitra jamais réellement.

Chaque jour de leur vie, elle distille son poison, pour sa perte. Et l'on a encore en tête les premières pages du roman: "Ces gens avaient des enfants qui tombaient malades (...) leurs femmes ou leurs maris devenaient fous en une nuit(...) Tous les jours une nouvelle tragédie, un nouvel accroc inexplicable dans la fabrique de l'ordinaire".

Comme toujours chez Goolrick, les corps se mêlent au paysage pour créer une atmosphère intriguante, froide. J'aime beaucoup cet auteur tourmenté pour l'écriture à la fois fluide, entrainante et pesante qu'il crée, donnant forme à ses propres fantômes ( lire Féroces pour comprendre).

On n'attend pas cette fin et l'on frémit pour cet homme qui méritait mieux, en même temps que l'on prend Catherine en pitié.

« C'était une histoire banale, où le froid pénétrait dans les os des êtres pour ne plus jamais les quitter, où les souvenirs s'enfonçaient dans leur coeur pour ne plus jamais le laisser en paix. C'était l'histoire de la douleur et de l'amertume qu'on endurait dans l'enfance, quand on était sans défense mais capable de reconnaitre le visage du mal, de secrets maudits qu'on ne pouvait raconter à personne, de la vie qu'on s'inventait contre sa douleur et la douleur des autres, impuissant à changer quoi que ce fût, l'histoire de la fin déjà écrite ». 

A lire absolument !

 

 

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