Cris, Laurent Gaudé
Cris, Laurent Gaudé, éditions Actes Sud, collection Babel, 2004, 128 pages
Genre : roman
Thèmes : première guerre mondiale, deuil, peur, abandon, folie
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L'histoire
Jules s'éloigne des tranchées, du coeur des combats. Il devrait en éprouver de la joie, pourtant ses pensées vont vers ses camarades, ses frères de sang pour qui les renforts ne viendront peut-être pas. Ils s'appellent Marius, Boris, Ripoll, M'Bossolo ou Barboni et sont unis, malgré la différence de grades, par l'horreur et la volonté de survie. La fraternité dans la guerre est marquée par une solidarité qui soutient les plus fous d'entre eux, marqués par la vision des gazés et les cris de l'homme cochon. C'est leur parole qui s'élève avec intensité. C'est pour eux que Jules témoignera, à sa façon ...
En vrac et au fil des pages ...
Cris est pour moi le plus bouleversant des écrits de laurent Gaudé. Peut-être parce qu'il est le premier que j'aie lu ou parce qu'il signe ce qui sera la marque des récits de l'auteur : la parole, l'aspect incantatoire, le verbe et le choix des mots pesés.
ici nous sommes plongés au coeur des tranchées et le travail documentaire sui sous-tend ce roman est important. On retrouve la boue qui s'infiltre en chaque soldat, les rats, le froid, la pluie et ce refuge qui devient peu à peu leur tombeau. On perçoit la folie qui s'insinue peu à peu, jusqu'aà l'acte fou qui fait s'élancer l'un des personnages à découvert, jusqu'à la poursuite de l'homme cochon dont on ne sait s'il est réel où issu de l'esprit dérangé des soldats.
Evidemment le lecteur comprend peu à peu quelle dimension symbolique Laurent gaudé a donnée à son récit et dont le point d'orgue est justement l'homme cochon, métaphore de de la bestialité à laquelle l'homme est rendu au coeur des combats.
Les chapitres sont ponctués par les interventions de Jules qui s'éloigne des combats mais est résolument marqué par ce qu'il a vu, entendu. Dès lors sa mission devient témoignage pour ses amis disparus, traumatisés.
L'aspect mythologique est très présent, comme dans tous les romans de Laurent Gaudé qui a fait de ces redondances le fond de ses écrits, tous différents et pourtant tous portés par la voix. A tel point que cette oeuvre aussi a été adaptée au théâtre.
Je dois dire que je demande à mes élèves de troisième de le lire car il me semble marquant, complémentaire avec des textes de Dorgelès ou Chevalier et par bien des aspects rappelle la BD de Tardi C'était la guerre des tranchées.