La Gifle, Christos Tsiolkias
La Gifle, Christos Tsiolkias, éditions Belfond, 2009, 466 pages
Genre : roman
Thèmes : famille, amitié, couples, discrimination, sexe
L'auteur en quelques mots ...
Né à Melbourne, Christos Tsiolkas est un écrivain d'origine grecque. Romancier mais aussi dramaturge, il connait avec La Gifle un succès international. Pourtant il n'en est pas à son premier écrit, loin de là. On le surnomme "le mauvais garçon des lettres australiennes" par le côté provocateur de ses écrits. En français on peut aussi lire Jesus Man , tableau dérangeant de l'Australie des années 90, un des premiers romans de l'auteur dans lequel pon trouve déjà les grandes lignes de La Gifle.
L'histoire : A Melbourne,le barbecue organisé par Hector et Aisha dans leur villa est l'occasion de rassembler la famille, les amis, de goûts , de milieux sociaux et d'origine différents. Hector est australien d'origine grecque, Aisha indienne, représentants d'une société multiculturelle qui pourrait faire penser à une carte postale de l'Australie rêvée.Mais ici, chacun critique ou encense l'autre alors que les enfants se disputent à cause du petit Hugo, enfant insupportable couvé par sa mère Rosie. Lorsque Harry s'interpose entre son fils et Hugo, c'est l'accumulation de toute la tension ambiante qui ressort et la gifle part, sous le regard médusé de l'assistance. Aussitôt on coupe court aux festivités et deux clans se forment : ceux qui pensent que le gamin l'avait méritée et ceux qui, fermement opposés aux sanctions physiques, pensent que l'adulte aurait dû se maitriser. A moins que ce ne soit pas si simple que cela. Car cet événement est le déclencheur d'une incursion dans la vie de chacun, où l'on découvre derrière le vernis, les infidélités, les critiques, les mensonges. Sur fond de critique sociale, les préjugés se font jour et les rancoeurs exacerbent les propos, les petits couples bien sages montrent leur côté obscur. Chacun a quelque chose à se reprocher, la drogue et l'alcool mènent le jeu, tous sont tiraillés entre leurs envies, leurs rêves et la société australienne dans laquelle ils vivent. Peu à peu les personnages trouvent leur voie, pas toujours celle qu'ils s'étaient tracée...
En vrac et au fil des pages : J'ai beaucoup apprécié cette chronique australienne, d'abord par la façon dont elle est présentée : un barbecue qui réunit tout le monde puis un chapitre consacré à un personnage en particulier, huit témoins que l'on découvre comme au microscope. Les points de vie divergent, se croisent donc et chaque personnage se dévoile un peu plus. Le plus surprenant est sans doute que la première impression que l'on a sur ces personnages n'est pas forcément la bonne. Ainsi Harry, dont on peut comprendre le comportement et la gifle qu'il donne au gamin, qui se révèle être un homme violent, limite raciste et que l'on finit par détester au fil de l'histoire. Ou encore ce petit bonhomme, Hugo, que l'on a tôt fait de classer dans la catégorie "insupportable" mais que l'on finit par apprécier grâce à l'approche de deux adolescents: Connie et Richie.Je n'en dirai pas plus car ce serait trop en dévoiler mais lorsque le vernis craque on découvre la solitude de chacun au milieu de tous.
Sans doute l'originalité, mais aussi le défi de l'écrivain, est-il d'avoir rassemblé des êtres aussi disparates, parfois au sein d'un même couple. Ce qui fait avancer dans ce cas se résume à quelques substance qui font oublier et d'autres qui donnent l'illusion de pouvoir continuer. Les plus forts comprendront alors vers quoi ils doivent tendre, quitte à sacrifier leurs rêves, les autres subiront. Un reflet de la société australienne que connait bien l'auteur.
Pourtant le roman ne mise par uniquement sur les adultes et donne à voir deux adolescent, révélateurs aussi des changements et des interrogations qui perturbent les jeunes , notamment en matière de sexualité. C'est d'ailleurs sur Richie que s'achève le roman, un jeune sur qui repose l'espoir finalement alors que les adultes se sont emmurés.
Un brin sulfureux, parfois très cru, ce roman se lit pourtant tout seul. On peut le lire sans connaitre la société dont on parle mais savoir que la communauté aborigène ( pourtant pas au coeur du roman) est encore en proie à la discrimibation et que ce pays a encore bien du chemin à faire pour fonder un socle commun de valeurs partagées, aidera à comprendre un roman qui peut sembler dur. La Gifle est celle que l'on prend aussi à la lecture de ce livre, celle que prennent bien des personnages face à la réalité ...
Je finirai juste en disant que l'on a comparé cet auteur à Jonathan Franzen.Pour ma part, même si le principe de la chronique ressemble, le style n'a rien à voir. Celui de Christos Tsolkias est plus prenant . Essayez le donc !