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Les Aventures fantastiques d'Hercule Barfuss, Carl-Johan Vallgren,

éditions Le Livre de poche, 2012,427 pages

Thèmes : inquisition, vengeance, télépathie, monstre, XIX°S

L'auteur en quelques mots ...

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Né en 1964 en Suède, Carl Hohan Vallgren est l'auteur de neuf romans ( honte à moi qui le découvre avec Barfuss !). Il est aussi musicien et en est à son septième album tout de même (mais comment ai-je pu passer à côté ?). Productif le bougre, mais on raconte qu'il ne dort que quatre heures par nuit. Document sur Rubashov le joueur, Histoire d'un amour monstrueux sont quelques unes de ses oeuvres mais seul Les Aventures fantastiques d'Hercule Barfuss a été publié en français à ce jour. Avec Barfuss il a voulu écrire un roman gothique, une histoire d'amour hors normes, un univers qui lui correspond.

L'histoire 

Juillet 1994. Jonathan Barefoot écrit à Mademoiselle Fagel et s'entretient avec elle de leurs origines communes: "Si votre hypothèse se révèle exacte, vous pourriez bien être ma plus proche parente encore en vie du côté paternel". Commence alors le récit de la vie mouvementée et extraordinaire de leur ancêtre, Hercule Barfuss, dont le narrateur tire son nom anglicisé, Barefoot et qui a laissé derrière lui une lignée de personnes sourdes dotées de capacités télépathiques. "Le gène récessif a disparu au début des années 1950 mais nous sommes plusieurs parmi les ainés à continuer d'employer le langage des signes (...) Pour nous, les sourds n'étaient pas des sourds. (...) Barfuss vivait envers et contre tout, avec un coeur qui aurait dû s'arrêter de battre dès sa petite enfance."

Mais la nature en décida autrement. Né en 1813 dans une maison close par une nuit de tempête, Barfuss fut élevé par une des prostituées qui vit en lui le fils qu'elle n'avait jamais eu. En mémoire de sa mère, morte en couche, chaque membre de l'institution veilla sur lui. C'est qu' Hercule était un enfant hors normes, sourd et muet, entre l'animal et l'humain, "une quintessences de difformités humaines" qu'il fallait protéger mais aussi cacher. La même nuit, dans la même maison, naquit Henriette. Tous deux entretinrent alors une relation fusionnelle qui devait guider leurs pas jusqu'à leur dernier souffle. Une relation basée sur la télépathie, sens extrêmement développé chez Hercule Barfuss et qu'il entretint au point d'en faire un don surnaturel.Une histoire d'amour aussi, au-delà de la différence et du jugement.

Pourtant, les épreuves que Barfuss devait endurer à une époque où la difformité faisait de l'humain une bête de foire, les séparèrent durant de longues années. Des années durant lesquelles il connu la prison, la faim, le rejet mais aussi le monde de Wilson, directeur de cirque qui l'engagea et lui fit connaitre les théories de grands penseurs, de mathématiciens, l'ouvrit au monde et aux arcanes de la conscience, du subconscient. Des années de calvaire sous le joug de Von Kiesingen ...

En vrac et au fil des pages

Quel curieux roman, construit autour d'une correspondance actuelle et qui commence comme un traité sur le monde des sourd et muets, les théories sur la langue des signes, en lien avec ce qui va suivre et en même temps si détaché que l'on ne sait ce que l'on va trouver dans le roman. Un début très érudit donc, très documenté, qui peut laisser perplexe.

Ce n'est qu'après lecture du roman en lui-même que j'ai apprécié ce que j'avais lu sans grande conviction en prélude aux aventures de Barfuss: l'état émotionnel dans lequel met la musique et qui se transmet au delà de l'ouie, le poids des mots qui n'a de sens que pour les personnes qui les entendent, l'intérêt en ce sens du langage des signes qui permet de sortir des limbes et d'accéder à l'abstraction...

Le titre prête à confusion car l'on s'attendrait à des "aventures" rocambolesques. Cependant ce qui nous attend est plus sombre, plus acéré. un univers gothique, comme le souhaitait l'auteur, qui nous entraine dans les recoins de la conscience malfaisante des puissants de l'époque, de la sphère religieuse, de l'inquisition. On ne lit pas sans frémir les tortures infligées aux hérétiques, on ne reste pas insensible à ce monde de la prosttution dénigré et bafoué par les hommes d'affaires qui s'y rendent et infligent aux filles des sévices hors de l'entendement.

Mais l'on se souvient de l'histoire d'amour, en fond et en même temps au coeur de l'histoire, de Barfuss et d'Henriette, que l'on perçoit comme la Belle et la Bête et pour qui on espère en même temps que l'on craint. Finalement, même si certains passages se révèlent plus fastidieux à la lecture, on est pris dans les filets de l'auteur qui met en scène un personnage atypique que l'on prend en pitié dès le départ mais qui étonne. On le suit jusqu'au bout dans les ruelles sombres où il fomente sa vengeance, on y croit et on n'y croit pas ... mais qu'importe car l'essentiel est là, dans le fantastique.

C'est un roman qui se lit comme un conte philosophique, dans lequel on retrouvera un peu l'univers du roman Le Nom de la Rose

 

 

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