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Les Sacrifiées, Laurent gaudé, "ditions Actes Sud, 2004, 113 pages

Genre : théâtre

Thèmes : malédiction, Algérie, émigration, femmes

L'auteur en quelques mots ...

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Laurent Gaudé est présenté sur la page du challenge ICI

L'histoire

Raissa est une jeune fille qui vit dans la montagne algérienne. Morte en couche, sa mère l'asouillée à jamais d'une faute qu'elle portera toute sa vie comme un fardeau, "fille tueuse de mère". Les voix qui se font entendre à elle sont celles des défunts qui lui parlent, de sa mère qui la réclame et des hommes qui la rejettent. Comme un oracle, l'un d'eux lui prédit qu'elle aura "plus de maris que de doigts" et ne sera qu'une ombre mais que "le monde qui vient aura besoin " d'elle. Elle comprendra cette prédiction lorque son chemin croisera celui de soldats français...

Trente ans plus tard, Leila, fille de Raissa, marche sans but dans les rues de Nanterre. Le choeur des émigrés chante le désespoir de n'avoir pu rentrer au pays après l'indépendance de l'Algérie. Au milieu de cette cité, "demandant du travail à ceux que nous avions battus (...) émigrés, harkis, tous regroupés sous ce même nom qui nous faisait rougir : "Arabes". Mais Leila , apprenant qu'elle n'est pas la fille de Meriem et Messaoud, sera la première à rentrer en Algérie, la première à renouer avec ses origines afin de , peut-être, laver l'offense de sa naissance ...

Dix ans plus tard, Saida, jeune fille moderne, fait partie de la génération qui a grandi dans les cités françaises. "Le quartier s'est peuplé d'une foule de jeunes gens qui trainent dans les rue. Il n'y a pas de travail". C'est la montée du fanatisme, les jeunes filles que l'on oblige à marcher tête baissée ou à porter le voile et dont la tenue vestimentaire occidentale est vue comme une offense par des hommes avides de soumission. Saida en fera les frais, perpétuant la lignée des femmes porteuses de honte, les "indécentes".

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mise en scène Jean Louis Martinelli

En vrac et au fil des pages ...

Comme toujours les pages de laurent Gaudé sont d'une force extrême. Dans un texte de théâtre, ce que l'on sentait dans ses romans prend de l'ampleur et justifie cette forme d'écriture : les voix, les chants, les choeurs. A la manière d'une tragédie antique, l'auteur renoue avec les choeurs qui accompagnent, chantent le désespoir ou l'espoir, soulignent les propos de ces femmes perdues.

La tragédie cependant prend un autre visage en parcourant l'Histoire de l'Algérie, de la guerre d'indépendance à la montée du fanatisme dans les cités françaises. Chaque fois, la place de la femme est remise en question. Chaque fois elles luttent, font preuve de courage et de détermination, dans la souffrance comme à l'approche de la mort.

L'homme apparait comme celui qui domine, soumet, fait force de loi et semble parvenir à ses fins. Mais  le courage de ces femmes est ce qui force l'admiration. Trois générations qui correspondent à des temps forts du lien Algérie-France, lourd d'une situation peu claire dès le départ ( "La fête de l'indépendance nous l'avons vécue là, entassés les uns sur les autres, avec nos gamins qui brandissaient de longs drapeaux vert et blanc, pieds nus, et nos femmes ont dansé cette nuit-là, comme ont dansé toutes les femmes au pays (...) et lorsque l'indépendance a été proclamée nous avons pensé que tout allait changer (...) que la nation allait avoir besoin de nous (...) et c'était une défaite pour chacun d'entre nous").

Voici un texte fort et émouvant, cruel aussi mais terriblement bien écrit. Un chant lyrique, une tragédie. Bref un texte puissant.


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