Je m'interroge beaucoup sur tes liens avec ce sujet fracassant auquel on ne prête pas assez attention au quotidien : OGM, faim dans le monde, domination.
Bravo, tu m’as découvert ! Je suis en réalité un politicien corrompu qui écrit sous pseudonyme ;-)
Plus sérieusement, je travaille au sein d’un milieu proche du monde politique (même si je n'en fais pas partie, heureusement), je vis au quotidien les recombinaisons stratégiques, les négociations, les chantages, pour arriver à des finalités qui parfois laissent l’intérêt général de côté. Tout cela a énormément nourri ma réflexion personnelle sur le « système » ;-).
En ce qui concerne la finance mondiale et l’environnement, c'est un énorme travail de recherche et de documentation qui m'a pris presque un an. En tant qu’écrivain « observateur du monde », je voulais comprendre les rouages de ces thématiques, qui, je le pense, sont au cœur de nos changements de civilisation actuels. Rien de mieux pour nourrir « l’arrière-plan » d’un roman d’action.
Ton roman est mené par moments comme un scénario et je n'ai pas eu de mal à visualiser les actions. Une technique cinématographique émane de ton écriture. Voulu ? Il serait facilement adaptable!
L'écriture cinématographique est une marque de fabrique volontaire. Mon rôle d’auteur est avant tout de divertir. Les lecteurs n'ont plus la patience de patienter 350 pages le temps que l'action veuille bien décoller. Il faut que ça bouge !
Toutefois, je ne suis pas partisan d'une écriture scénaristique trop hachée qui se concentre sur l'action et sur les dialogues et appauvrit la langue. Mon "graal" est de trouver la bonne image : pas besoin d'écrire des tartines de descriptions ennuyeuses, une représentation mentale qui touche facilement le lecteur, une immersion immédiate dans l'action, et cela permet de m'amuser littérairement.
Tu écris des Thriller. Qui sont tes auteurs favoris dans ce genre ? J'imagine que tu es aussi un grand lecteur ...
Ho là là, je t’arrête tout de suite ! Je n’ai écrit qu’un seul thriller et je refuse de m’enfermer dans un genre. Mon premier roman était un roman « social », mon second un thriller, mon troisième lorgnera d’un autre côté !
Tu ne t’étonneras pas donc si je te dis que mes romans préférés ne sont pas forcément orientés thriller. J’ai même plutôt un penchant pour la S.F. : Dragon Déchu de Peter F. Hamilton est un must du genre. Sinon, les autres romans qui m’ont influencé sont La Guerre du feu, et la façon très brute de Rosny Aîné de décrire les scènes de combat ; Le meilleur des mondes, de Huxley, où j’ai découvert la construction d’un univers crédible basé sur des principes sociétaux complètement différents ; Band of brothers de Stephen Ambrose (qui n’est pas un roman à proprement parler) mais qui prend d’autant plus de profondeur que les évènements racontés sont véridiques.
Et pour répondre quand même à ta question, côté thriller, j’aime les classiques : Harlan Coben (même si ça tourne un peu en rond : le gars qui est mort-mais-en-fait-pas-vraiment est lassant à force), Ken Follett (Les piliers de la terre est un chef-d’œuvre), Werber (le côté new-age est toutefois un peu agaçant), John Grisham (L’idéaliste est vraiment très bon), Dan Brown (pour le côté pas de temps mort), Vargas, Grangé, Loevenbruck, etc.
Troisième opus : peut-on en savoir un peu plus ? Dans quel milieu évolueront les personnages par exemple ...
Comme tu as pu le constater, je suis un grand fan des thématiques sociales. J’aime parler de la façon dont un groupe / une société / une civilisation peut basculer à un moment ou un autre, s’éteindre, ou évoluer. Pourquoi les gentils ne se feront plus avoir exposait un changement philosophique de civilisation dans un roman généraliste. On ne peut pas lutter contre le système montre comment celle-ci peut s’écrouler dans un thriller.
Le troisième, va donc raconter comment une société se transforme, en lorgnant du côté fantastique… Je ne t’en dis pas plus pour le moment ! Faut bien que je réserve la surprise ;-)
Le fait que tu insères un fond social ou politique, en tous cas actuel, dans tes romans est-il une forme d'engagement, de dénonciation ?
Pas du tout ! Point d’engagement ou de dénonciation chez J. Heska ;-). Pour moi, un artiste est avant tout un observateur du monde qui doit soulever des questionnements. C’est le lecteur qui doit trancher. D’ailleurs, rien ne me fait plus plaisir lorsque j’assiste à des débats contradictoires sur le fond de mon œuvre : ça montre que mon point de vue était suffisamment neutre pour susciter des impressions différentes. Après, je reste un être humain, il y a donc forcément une prise de position à un moment ou un autre, même si j’essaie de gommer cela.
En tout cas, mon but premier est d’offrir une dose d’évasion et de liberté aux lecteurs, pas de bourrer des crânes avec une démonstration idéologique complètement biaisée.
Ecrire en 2012 : pas facile d'être édité. Quelle est ta démarche ? J'imagine que tu as envoyé ton manuscrit à plusieurs maisons d'édition...ou bien crois-tu davantage en l'auto publication ?
J’ai publié mon premier roman, Pourquoi les gentils ne se feront plus avoir, à vrai compte d’éditeur après avoir ramé plusieurs années (envoi de manuscrits, refus, rendez-vous, refus, etc.). Ce fut une expérience intéressante… mais que je ne renouvellerai pas pour tout l’or du monde !
L’édition est un monde particulier, qui, malgré ce que les grands éditeurs peuvent indiquer la main sur le cœur, reste globalement déconnecté de toute démarche artistique. Qu’on vendre du papier toilette ou des livres, c’est la même chose (et encore, je soupçonne le consortium du papier toilette de plus penser au bonheur des acheteurs que les éditeurs).
Quand j’ai décidé de publier On ne peut pas lutter contre le système, j’ai donc voulu le faire selon mes conditions. Je me suis auto-édité. Dans ce domaine, depuis quelques mois, il y a une volonté, des outils (impression à la demande, livre numérique, etc.) et une énergie qui stimulent les démarches. Le tout à des coûts réduits. Par contre, je ne conseille pas ce type d’édition à tout le monde : il faut avoir les reins solides et surtout, être sûr de ses capacités en tant qu’écrivain.
Ton roman et les blogueurs : la critique va bon train concernant les blog de lecture ! Tu as opté pour ce type de communication. Pourquoi ?
Parce que les blogueurs restent le « média » que j’affectionne le plus : des gens passionnés, animés d’une vraie démarche artistique, sympathiques, pas encore blasés et obnubilés par la revente des SP, pertinents, meilleurs chroniqueur que n’importe quel journaliste et surtout, indépendants ! J’aime discuter et débattre avec les blogueurs, c’est une expérience très enrichissante. Que la critique soit positive ou négative, elle est en général constructive et peut même parfois, dans certains cas, influencer ma manière d’écrire.
Mais de manière générale, si je suis beaucoup présent sur le web et auprès des blogueurs, c’est avant tout parce que j’y prends du plaisir. Vendre des livres ne doit pas être un objectif en soi, sinon la démarche est très décevante (le porno amateur, c’est plus rémunérateur ;-) ).
Le mot de la fin
Merci beaucoup pour cet échange très sympathique !