Profondeurs, Henning Mankell
Profondeurs, Henning Mankell, éditions du Seuil, collection Points, 2010,348 pages
Genre : roman psychologique
Thèmes : mariage, attirance, mensonge, meurtre, errance
L'auteur en quelques mots ...
Né en 1948 à Stockholm, Henning Mankell est un romancier et dramaturge suédois. Son père étant juge à la cour, il se passionne rapidement pour les discussions autour de crimes et des châtiments réservés aux criminels. A 16 ans il abandonne l'école et s'engage comme marin marchand pendant deux ans puis il s'installe à Paris. On le connait généralement par sa série metttant en scène l'inspecteur Wallander. Son premier roman parut en 1973, année où il découvrit l'Afrique pour la première fois. Partageant sa vie entre Suède et Mozambique où il a fondé le Teatro Avenida, il signe de nombreuses pièces, dont certaines pour la radio.
Henning Mankell aime s'interroger sur les hommes, leurs motivations profondes et leur nature.
L'histoire
" Les jours sans vent on entendait les cris des fous de l'autre côté du lac.
En automne surtout. C'était la saison des cris.
C'est aussi en automne que commence cette histoire. Dans un brouillard humide, par quelques degrés à peine en dessous de zéro, une femme entrevoit soudain la liberté. Elle a découvert un trou dans la clôture.
Automne 1937. Cette femme s'appelle Kristina Tacker, elle est enfermée depuis des années dans un grand hôpital psychiatrique aux environs de Säter. Elle n'a plus aucune notion du temps. (...)
Elle se souvient qu'autrefois elle avait un mari."
Automne 1914. Bien que la Suède soit neutre et ne souhaite pas entrer en guerre, les généraux observent les allemands et les russes qui se battent au large de ses côtes. Lars Tobiasson-Svartman, hydrographe, est chargé de relever une route maritime entre le détroit de Kalmar et Stocholm. Comme à chaque expédition, il quitte sa femme, Kristina Tacker et embarque pour une mission secrète. Le couple vit une relation distante, entrecoupée par les expéditions de Lars Tobiasson, marquée par une méconnaissance de l'autre qui les fait se réfigier chacun dans son univers.
Cependant l'expédition à bord du Blenda qui doit le mener au large de l'île d'Halsskär va se révéler d'une autre teneur. Passionné par les mesures, Lars Tobiasson Svartman sonde par la même occasion son être intérieur et se révèle à lui-même au fil des jours. Trouver la faille la plus profonde en mer, au-delà de toute mesure, est un rêve qui le mène à explorer toujours plus loin la zone ciblée. Jusqu'au jour où il accoste sur l'ile d'Halsskär et y rencontre Sara Fredrika, jeune femme qui vit seule, isolée sur cet îlot inhabité depuis le décès de son mari.
Entre eux nait une étrange attirance mêlée de répulsion . Sara Fredrika deviendra sa maitresse, pour sa perte ...
En vrac et au fil des pages ...
Le cuirassé russe Slawa, touché par les canons allemands va être sabordé et sombrera le 18 octobre 1917
Etrange récit que celui d'Hennig Mankell que je découvre à travers ce roman. je ne souhaitais pas commencer par les enquêtes de Wallander mais par un récit indépendant.
L'ambiance est sombre, particulièrement lourde dans ce roman qui nous entraine sur les mers du Nord en temps de guerre. De la guerre cependant l'on sait peu de choses sinon le positionnement ambigu de la Suède qui se déclare neutre mais n'hésiterait pas à se ralllier aux allemands semble-t-il et les reflexion concernant les combats en mers entre Allemagne et Russie.
Le personnage de Lars Tobiasson Svartman est particulièrement fouillé. Un être qui se révèle à lui-même au fil des pages, laisse éclater sa violence et en même temps s'entoure de mensonges qui le mèneront à sa perte. Car, on le comprend rapidement, la fin ne saurait être autre que tragique pour cet homme que l'on finit par détester.
Ne connaissant pas l'auteur j'ai pensé un moment qu'il nous entrainait sur la pente du fantastique avec cette femme vivant seule sur un îlot, les similitudes vec Kristina Tacker restée à Stocholm, jusqu'au prénom de leurs petites filles. Etrange ambiance donc qui fait que l'on ne sait pas où cela va nous mener.
Pour moi qui redoute la profondeur des flots, la noirceur de ces espaces, certains passages sont assez redoutables. La mort qui entoure le personnage de Lars, le doute qui s'insinue lorsqu'il révèle réellement son être profond, font de ce texte un récit haletant dont on ressort un peu troublé.
C'est ici le thème du double qui est exploré par Henning Mankell, à la fois dans la description du côté obscur du personnage et dans le miroir que révèle cette double vie dans laquelle il s'engage. Seul lien entre les deux : le mensonge. Lars Tobiasson Svartman se ment à lui-même et, découvrant la vérité que d'autres avaient perçue en lui, ne peut que se résoudre à fuir. On le découvre lâche, injuste, jaloux. Sa froideur rebute en même temps qu'elle dégoûte.
C'est l'histoire d'une faille, des profondeurs de l'âme humaine.
Je compte bien poursuivre ma découverte de l'auteur dont je connais à présent la plume.