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Que ton règne vienne, Xavier Demoulins, éditions JC Lattès, 2014, 219 pages

Thème : deuil, famille, adultère, amitié, dépression, amour

Genre : roman contemporain

L'auteur en quelques mots ...

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Journaliste de presse et de télévision, Xavier Demoulins d'Amieu de Beaufort est né en 1972. Après un cursus le Lettres et un DESS en télécommunication, il devient pigiste pour divers journaux puis intègre l'équipe de Canal + en 2002. On le verra aux côtés de Maitena Biraben dans Nous ne sommes pas des anges ou dans Paris Dernière sur Paris première jusqu'en 2010, année où il devient résentateur du journal de M6. On le retrouve en 2013 dans Zone interdite.

Son premier roman, Un Coup à prendre, a été publié en 2011 et devrait être adapté au cinéma. En 2012, Un Parfait ciel bleu, suit.

Le petit plus : Je me suis laissée dire que Xavier Demoulins apprécie l'écriture de Murakami. Je ne peux qu'adhérer et suis ravie de ce point commun ;)

Merci aux éditions JC Lattès et au forum Livraddict pour ce partenariat.

 

l'histoire :

2015

"J'ai crevé de t'aimer, c'est toi qui meurs.

Que reste-t-il mon Belzébuth ? Ton vacarme"

Deux ans après le décès de son père, Paul remonte la pente,épaulé par son ami Oscar. Mais qui était donc cet homme dont Paul dit "Mon père est un gangster moderne. Il m'a donné la vie et l'a ouverte au cran d'arrêt" ?

2013. L'année où tout va basculer. Une mère éplorée, un fils qui ne cache pas sa dépression et maudit son père de lui avoir gâché la vie. Un accident dont il se sent responsable, "J'ai une terreur d'après -coup. Que mes enfants et ma femme aient pu faire partie du cortège. Il s'en est fallu de peu que l'enterrement de mon père finisse en charnier".

Et pourtant ce père qu'il hait aujourd'hui a été le plus rayonnant des compagnons, le plus attentionné pour son fils. Un homme charismatique, sûr de lui. Mais un père de plus en plus présent dans sa vie, auprès de sa femme, de ses enfants. Un père dont il entend encore la voix lors des disputes avec sa mère. Un père dont l'ombre plane comme la trahison qui a mis fin à la confiance.

Alors que son meilleur ami Oscar va se marier, que reste-t-il de son propre mariage avec Ava ? Une séparation. Et si la blessure était plus profonde que cela ?

Pour rebondir il faudra se défaire de l'image encombrante du père pour avancer et affirmer sa place d'homme, d'amant, de père.

En vrac et au fil des pages ...

C'est un roman très fort émotionnellement que nous propose Xavier Demoulins. Le lecteur se laisse porter de chapitre en chapitre et comprend rapidement que les retours en arrière dans la vie du narrateur sont essentiels car mettent en place des indices qui nous méneront à la compréhension de son état.

Cela aurait pu être une simple histoire de depression, une histoire de séparation, de dispute. Mais la fin ( et je ne la dévoulerai pas ici) révèle un secret que l'on n'attendait pas, ou plutôt que l'on sentait venir mais que l'on ne pouvait raisonnablement accepter. Les jalons sont posés, on soupçonne, on devine, on doute, on suit les relations d'amour/haine d'un fils envers son père, la recherche de l'amour paternel puis son rejet.

La construction par petits sauts dans le temps est ici judicieuse et ne freine en rien la lecture, de même que la construction des phrases, courtes, incisives, justes. Je dirais qu'elles  accompagnent la depression, les doutes du narrateur.Seule la mention de l'année 2015 interpelle : pourquoi le futur ? J'aime me creuser le tête pour comprendre et il me semble que cette projection est aussi celle du narrateur, Paul, dans un avenir très proche qui pourrait le ramener à la vie. Je pense que tout cela est symbolique et ne doit pas dérouter le lecteur.

Il en va de même pour le titre qui porte en creux le nom du Père, le tout puissant, celui qui régit la vie de son enfant et laisse une trace même après sa mort. C'est extérieurement celui que l'on ne nomme pas et dont seules les pages intérieures et le personnage portent la trace.

Petites reflexions au passage sur le mariage gay, sans jugement, justement pour le mettre au même plan que le mariage hétérosexuel me semble-t-il, avec ses aléas et ses espoirs. Quelques pépites aussi à travers les sauts dans le temps, les années 80, le récit d'une enfance dans laquelle on peut se retrouver, celle d'un enfant aimé et attendu.

On ne tombe pas dans le pathos avec Xavier Demoulins mais une tranche de vie nous est offerte et on plonge dans ce récit émouvant avec plaisir et inquiétude, on se laisse emporter jusqu'à la révélation finale ...

L'image de la mère est ici touchante. Une présence plus qu'une vie me semble-t-il, une femme effacée, en souffrance et en même temps amoureuse et présente, dans l'attente. Les femmes d'ailleurs apparaissent dans ce roman sous un jour plus doux mais ne sont pas totalement dévoilées. Subsiste une part d'ombre, une solitude en chacune d'elle, y compris Ava qui n'assumera pas ses actes.

Un livre lu dans la journée et une belle découverte, d'autant que je ne savais absolument pas que cet homme, que je ne connais que par son statut de présentateur du JT, était aussi écrivain. J'espère découvrir un autre de ses récits rapidement.

Merci aux éditions JC Lattès et au forum Livraddict pour ce partenariat et cette belle découverte

J'ai lu ce roman en lecture commune avec Achille. Voici son avis. Nous nous sommes livrés à un petit jeu de questions réponses (en cours d'écriture ! )

Voici les questions d'Achille ; 

- as-tu pu associer cette lecture et cette thématique à d'autres romans ? 

pas un roman mais un essai de J Kristeva qui s'appelle "Un père est battu à mort" et qui reprend la thématique du père haï et aimé à la fois. Mais là on entre bien entendu davantage dans la psychanalyse et je vois que cela t'intéresse puisqu'une autre de tes questions reprend ce thème ;)
- penses-tu que les schémas développés par l'auteur (mère quittant son mari pour une autre femme dans le cas d'Oscar  et père tout puissant dans son couple et indécrottable coureur de jupons pour Paul) ne peuvent que se reproduire ? 

absolument pas. Je pense que cela peut être un fardeau mais qu'une personne peut se détacher du poids familial. D'ailleurs c'est la reflexion entamée dans ce roman; le personnage se délivre peu à peu de ces entraves et va vers un avenir à construire. Il me semble que l'on subit un temps mais qu'un travail permet de se libérer.
- la question du rapport père - fils amour / haine est-elle ici excessive ? 

C'est effectivement ce que j'ai pensé au début mais la trahison, dont on ne peut parler sans dévoiler l'intrigue, est grande et l'attitude du père ,condescendante, nie totalement son fils.
- un homme a-t'il besoin d'autres modèles masculin pour se construire ?

vérité ou caricature ? 

tu parles du mariage gay là ? Je connais des familles très féminines dans lesquelles tout s'est bien passé. Les valeurs sont véhiculées aussi en dehors de la famille. Il ne faut pas rester aveugle à l'influence de l'extérieur.
- pour dresser un tel rapport entre ce père et son fils avec autant de justesse, n'y aurait-il pas un peu de vécu identique chez l'auteur ? 

ah ça ... vaste question. Tu trouves que cela sent le vécu ? Je pense qu'on a tous un problème avec notre mère ou notre père non ? Un non-dit, un poids. On dit qu'un écrivain porte forcément une blessure

vous avez trois heures .....lol

hihi ! c'est vrai qu'on frôle le sujet de philo là ! 

 

 

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